Si les conjonctures y fluctuent, Iberdrola continue lui de les survoler avec panache. Sur son segment renouvelables, où le groupe entretient déjà 45GW de capacité, essentiellement dans l’éolien, tout va toujours bien : les retours sur investissements sont nettement positifs et le retrait de grands concurrents européens comme Shell, BP et Orsted lui ouvre de nouvelles perspectives.
Voir à ce sujet Orsted A/S : Equinor entre en scène au plus-bas, et Shell plc : Adieu politiquement correct.
Sur son segment réseaux, qui constitue le coeur de sa stratégie d’expansion, l’espagnol reste à l’offensive. Cet été, le groupe concluait le rachat du britannique North West au nez et à la barbe de Engie. La transaction consolide la position d’Iberdrola au Royaume-Uni, puisque celui-ci était déjà propriétaire de l’écossais Scottish Power.
La très bonne réputation d’Iberdrola sur les marchés de l’énergie — les cadres de TotalEnergies, généralement pas du genre à distribuer des fleurs, sont les premiers à la souligner — s’étend aussi aux marchés financiers et aux investisseurs : le groupe a assuré à ses actionnaires un rendement total très supérieur à ses pairs européens, et même à ses meilleurs pairs nord-américains.
Sur quinze ans, avec une linéarité remarquable, tel un métronome, son profit et son dividende par action ont chacun cru à un rythme anualisé de 6% et 7%. C’est mieux que TotalEnergies, qui pourtant ne fait pas pâle figure, et incomparablement mieux que la performance économique médiocre d’un Enel, ou celle carrément désastreuse d’un Engie ; à sa décharge, reconnaissons à ce dernier de n'être pas toujours maître de son destin.
Le futur d’Iberdrola passe pas le contrôle des réseaux, soit son segment d’activité qui offre la meilleure visibilité à long terme. Ce dernier absorbera deux-tiers des investissements par an, en visant en priorité et dans la mesure du possible le marché nord-américain, plus rentable mais très difficile d’accès. En témoigne plus tôt cette année le rachat avorté de PNM Resources, même si le groupe laisse entendre à demi-mot que ce ne fut que reculer pour mieux sauter.
En parallèle, les quatre-cinquièmes des investissements resteront orientés vers des marchés développés et régulés. Le goût du risque, on le voit, demeure limité chez l’espagnol. Même chose évidemment au niveau du bilan, avec un endettement net qui ne devrait pas dépasser x3.5 le profit d’exploitation avant investissements, ou EBITDA.
Le segment renouvelables, conjoncture et saturation des grands bassins obligent, tend à passer au second plan dans les nouvelles orientations stratégiques, avec dans les tuyaux 9GW de capacité supplémentaire sur les trois prochains années. Bien intégré sur presque toute la supply chain de l’éolien — un paramètre indispensable pour espérer y rentabiliser les projets — Iberdrola ne s’engage ici qu’avec le concours de financements extérieurs qui diluent nettement son risque.
Le groupe projette de générer un cash-flow de €18 milliards en 2026, duquel on peut soustraire les €12 milliards d’investissements prévus à date pour obtenir un cash-flow libre estimé à €6 milliards, et une distribution de dividendes aux actionnaires de €3.8 milliards — soit, pour un investisseur qui entrerait au cours du moment, un rendement de 4.4% attendu à date.
Cela s’inscrirait en parfaite cohérence avec la stratégie de gestion du groupe, qui vise à investir les deux-tiers de son cash-flow d’exploitation, et à en distribuer un bon cinquième à ses actionnaires.