Greenpeace célèbre cette année ses 50 ans. L’acte fondateur avait été posé par des quakers, d’anciens hippies et déserteurs du Vietnam qui avaient armé un vieux chalutier pour s’opposer aux essais nucléaires américains sur le site d’Amchitka, en Alaska. Le mot Greenpeace était inscrit en grand sur la voile…
Découvert dans La Vie Catholique
« C’était au début un mouvement très anglo-saxon. Le bureau de Paris n’a été ouvert qu’en 1977 », raconte Yannick Rousselet. Actuel responsable de la campagne nucléaire pour Greenpeace France, le Cherbourgeois se rappelle avoir découvert l’organisation dans une double page en couleur publiée par La Vie Catholique. « L’action directe non violente, cela me plaisait. »
Dans ces années 70, les deux premières tranches de la centrale nucléaire de Flamanville étaient en construction et du côté de la Hague, où la Cogema avait remplacé la CEA, on parlait d’une extension de l’usine et du retraitement de combustibles usés venant du Japon.
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J'avais participé aux manifestations antinucléaires à Flamanville. Il y avait pour moi une incompatibilité avec les barbelés et les CRS.
Dans le Cotentin, le chef de file de la contestation était alors le Comité contre la pollution atomique dans la Hague, le CCPH, avec des figures comme Rémi Parmentier, Norbert Girard et Didier Anger. Et les mouvements qui se sont alors développés réunissaient aussi le Parti socialiste, le Parti communiste français, la CGT et la CFDT.
Le sujet mobilise en janvier 1979, contre l’arrivée du Pacific Fisher, avec dans ses soutes 13 tonnes de combustibles japonais. 10 000 manifestants sont à Cherbourg, les grues du port escaladées. Et Greenpeace s’affiche en tant que tel pour la première fois. « Une période très animée au plan social », se souvient aussi Yannick Rousselet.
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En février 1980, c’est le Pacific Swann qui mobilise les antinucléaires. « Nous attendions le Rainbow Warrior à Cherbourg, mais il était maintenu dans les eaux internationales par la Marine. Nous avons alors acheté deux vieux Zodiac, rebaptisés Strontium et Tritium, pour empêcher l’accostage du Pacific Swann. On faisait des calculs de coin de table pour estimer son heure d’arrivée », rapporte Yannick Rousselet.
Il y avait un brouillard incroyable, des policiers partout. Nous avons été six interpellés. C'était la première fois que j'allais en prison dans l'arsenal, avec un débrayage dans l'arsenal pour réclamer ma libération.
Dans la foulée, un rassemblement antinucléaire devait être organisé à Gréville-Hague. « Une tempête de force 8 a tout balayé. On a bloqué trois trains spéciaux qui arrivaient d’Italie, plus de 30 000 personnes se sont réfugiées sous le marché couvert de Sainte-Mère-Église. On avait loué la sono des Rolling Stones, Jacques Higelin a donné un concert mémorable. Mais il a fallu après organiser pas mal de bals folk pour rembourser les dettes. »
La sono des Rolling Stones
Après l’attentat contre le Rainbow Warrior, en juillet 1985, le bureau français de Greenpeace, qui avait été infiltré par la DGSE, est fermé. « Nous avons maintenu une petite équipe, en travaillant avec les Belges. »
L’action de Greenpeace sera relancée en novembre 1992 avec l’Akatsuki Maru, un cargo japonais venu charger 1,5 tonne de plutonium en présence de Dominique Strauss-Kahn, alors ministre de l’Économie.
Pour les militants antinucléaires, c’est la mobilisation générale, avec des manifestations pendant une semaine à Cherbourg. « Nous avions des fermes pour cacher le matériel, et même un avion de tourisme pour des reconnaissances », se souvient Yannick Rousselet.
Un groupe local, le premier en France, est créé en 1994. Yannick Rousselet devient alors administrateur de Greenpeace France, puis va devenir permanent.
Le Cotentin reste un lieu privilégié pour les actions de Greenpeace. En 1998, c’est l’affaire de la conduite de rejet qui va obliger Cogema à l’époque à nettoyer le tartre chargé de radioactivité qui s’y est accumulé.
Il y aura, parmi les actions marquantes, des occupations du chantier de l’EPR ou du centre de stockage de l’Andra, « qui nous a permis de prouver la présence de plutonium », le marquage de convois de matières radioactives, jusqu’à poser un drone sur le toit d’une piscine de la Hague… « Mais nous avons annulé plus d’actions que nous n’en avons menées à terme », assure Yannick Rousselet.
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