Ce que l’on sait du plan d’Emmanuel Macron sur le nucléaire

Par Thierry Mestayer

Le projet de petits réacteurs nucléaires SMR sera accéléré avec le plan d’investissement « France 2030 ». La décision officialisée mardi 12 octobre à l’Élysée est un ballon d’oxygène bienvenu pour une filière mise à mal par les interrogations sur la technologie EPR et la fragilité financière d’EDF.

La centrale nucléaire de Chooz, dans les Ardennes.
La centrale nucléaire de Chooz, dans les Ardennes. (Illustration Julien Warnand / EPA)

Les ministres ont revu leurs copies en septembre et Emmanuel Macron a tranché sur les technologies de rupture qui seront soutenues par le plan « France 2030 ». Cette manne de 20 à 30 milliards d’euros est le dernier guichet de la relance post-covid de son quinquennat, après « France Relance » lancé il y a un an.

Le président de la République confirmera mardi 12 octobre, depuis l’Élysée, que le nucléaire sera ajouté aux nouvelles filières industrielles essentielles à l’avenir du pays, au côté de l’hydrogène, des puces électroniques, des batteries, de l’espace et de la santé. Macron fait le pari d’une impulsion en faveur des réacteurs de petite taille. Après le gigantisme et les difficultés techniques de la technologie EPR (1 600 MW), Paris veut mettre l’accent sur les SMR (« small modular reactor ») produisant entre 150 MW et 400 MW.

Les SMR « moins onéreux, plus faciles à construire »

« Il y a une révolution en cours dans la technologie nucléaire comme il y en a eu une dans la santé ou dans l’espace avec la digitalisation, explique un député de la majorité au fait du dossier. Les petits réacteurs SMR sont moins onéreux, plus adaptables, plus faciles à construire en grand nombre et à installer. Leur petite taille permet aussi un meilleur contrôle en cas d’accident ». L’intérêt à l’export est multiple : ces réacteurs pourraient remplacer des centrales à charbon ou à gaz plus polluantes et alimenter des besoins locaux, comme des usines de dessalinisation d’eau de mer.

Si France Relance investit, ce n’est pas pour servir des intérêts étrangers.

La France n’est pas absente de ce segment, même si la technologie reste embryonnaire par rapport à la Chine ou la Russie, qui exploite déjà deux réacteurs de 35 MW sur une barge flottante en Sibérie orientale. Depuis 2019, un projet de SMR baptisé « Nuward » est développé par EDF, le Commissariat à l’énergie atomique, Naval Group et TechnicAtome. « Nous en sommes au tout début du développement, tempère-t-on chez EDF. Le produit ne sera disponible qu’après 2030 ». Faut-il engager une coopération internationale pour accélérer le mouvement ? « Si France Relance investit, ce n’est pas pour servir des intérêts étrangers », balaie une source au fait du dossier.

Des réserves sur le nucléaire au sein du gouvernement

En amont de la prochaine campagne présidentielle, Emmanuel Macron clarifie son positionnement en faveur du nucléaire, dans les pas du général de Gaulle et de Georges Pompidou qui l’ont initié. Il ne s’agit pourtant pas d’une conversion récente pour le président, même si les premières années de son quinquennat furent marquées par l’arrivée de Nicolas Hulot au gouvernement et l’arrêt de Fessenheim. « Le nucléaire restera la pierre angulaire de notre autonomie stratégique », avait-il affirmé lors d’un déplacement au Creusot en décembre 2020 où la propulsion nucléaire du futur porte-avions français avait été confirmée.

Barbara Pompili, l’ex-EELV qui a succédé à Hulot comme ministre de la transition écologique, « est gênée aux entournures pour accepter cet arbitrage en faveur du nucléaire, reconnaît un proche du président. Elle s’en sort en mettant en avant le nucléaire comme énergie de transition et la sûreté des installations ». Ces réserves au sein du gouvernement compliquent toutefois le véritable élan attendu par la filière nucléaire : l’acquisition d’une série de réacteurs EPR pour prendre le relais des centrales les plus anciennes. « Il faut lancer dès à présent cette série pour répondre aux besoins en énergie après la fermeture anticipée des deux réacteurs de Fessenheim et celle de douze réacteurs supplémentaires d’ici à 2035 prévues par la loi de programmation pluriannuelle de l’énergie », réclame Sébastien Menesplier, secrétaire général de la fédération CGT- Énergie. Un document de travail de Bercy et d’EDF mentionnait l’acquisition de six exemplaires pour 45 milliards d’euros.

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Un montant gigantesque alors que la mise en service de l’EPR de Flamanville, prévue en 2012, est désormais planifiée en 2023 et son coût s’est envolé de 3 milliards d’euros à 12, 4 milliards ! Les déboires à la centrale finlandaise d’Olkiluoto comme l’arrêt depuis juillet d’un des deux réacteurs de Taishan (Chine) incitent aussi à la prudence. Il faut ajouter qu’EDF croule sous une dette de 40 milliards d’euros et le « grand carénage », qui doit permettre aux centrales de continuer leur activité, lui coûtera 45 milliards d’ici 2025. La relance de l’EPR attendra. Emmanuel Macron a repoussé une décision définitive après l’entrée en service de Flamanville.

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