Nucléaire. En grève, les experts de l'IRSN dénoncent le projet de démantèlement

Ce 20 février 2023, des permanents de Cherbourg (Manche) de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) étaient en grève. Ils dénoncent le projet de démantèlement.

L’installation de la cuve de l’EPR de Flamanville (Manche), en 2014. À plusieurs reprises, l’IRSN a souligné un défaut de conception du plenum des cuves.
L’installation de la cuve de l’EPR de Flamanville (Manche), en 2014. À plusieurs reprises, l’IRSN a souligné un défaut de conception du plenum des cuves. (©DR)
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Ce lundi 20 février 2023, à l’appel de l’intersyndicale CFDT, CFE-CGC et CGT, « une grande partie » des quatorze permanents du laboratoire de Cherbourg (Manche) de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) était en grève. Un mouvement qui a touché les neuf sites de l’IRSN, qui emploie globalement un peu plus de 1 700 collaborateurs. L’entrée du site à Cadarache a été bloquée et une manifestation a eu lieu devant le ministère de la Transition écologique.

Ils dénoncent le projet de démantèlement de l’Institut, annoncé le 8 février à l’issue du Conseil de politique nucléaire. Une décision qui implique que « les compétences techniques » de l’IRSN seront réunies avec celles de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN), le Commissariat à l’énergie atomique (CEA) et le délégué à la sûreté nucléaire pour les activités et installations intéressant la défense (DSND).

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Un risque de « paralysie »

Cette évolution, selon le gouvernement, conduirait à « renforcer l’indépendance du contrôle en matière de sûreté nucléaire, au sein d’un pôle unique et indépendant de sûreté », et à « consolider, renforcer les compétences et fluidifier les processus d’examen technique et de prise de décision de l’ASN » pour répondre au volume croissant d’activités lié à la relance de la filière nucléaire.

Réuni le 16 février, le conseil d’administration de l’IRSN a vu les choses un peu différemment. Composé de vingt-quatre membres, dont la moitié issue des ministères de tutelle, il a voté à une très large majorité (dix-huit voix) une motion dans laquelle il « alerte le gouvernement sur le risque de départs du personnel de l’IRSN pouvant entraîner une paralysie du système de contrôle en radioprotection et sûreté nucléaire.

Ces experts de haut niveau sont des garants de la protection de l'environnement et de la population. Leur diaspora aurait pour conséquence de priver la France de sa capacité de recherche et d'expertise à un moment crucial marqué par les défis de l'allongement de la durée de vie des réacteurs existants et de la création de réacteurs de nouvelle génération.

Conseil d'administration de l'IRSN

Les syndicats, eux, ont été reçus le 17 février par Agnès Pannier-Runacher. Et ont dénoncé « le caractère brutal et sidérant de l’annonce du projet. Nous l’avons tous vécu comme une trahison ».

Ils ne comprennent pas davantage « la précipitation » avec laquelle cette réforme est engagée, à travers un amendement au projet de loi d’accélération du nucléaire qui serait déposé d’ici la fin du mois.

Pour les syndicats, ce calendrier « ne permet pas de prendre en compte la complexité d’un système de gouvernance des risques nucléaires et radiologiques » qui concerne les installations nucléaires civiles et de défense, les usages médicaux, la gestion de crise…

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Ils réclament, à tout le moins, un diagnostic de l’existant et d’une étude d’impact des différents scénarios qui seraient envisagés.

« Un système de gouvernance des risques nucléaires et radiologiques, construit sur quarante ans, ne peut pas être démantelé en quatre semaines », insistent dans une lettre ouverte à Agnès Pannier-Runacher les délégués syndicaux centraux, Luc Codron pour la CFE-CGC, François Jeffroy pour la CFDT et Philippe Bourachot pour la CGT.

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« Le système actuel a fait ses preuves »

« Tout système est perfectible, pour autant, le système actuel a fait ses preuves et il serait dangereux de le déstabiliser si brutalement, au moment où la France relance un programme nucléaire d’ampleur. »

Le 20 février, ASN, CEA et DSND devaient remettre à la ministre une feuille de route pour la mise en œuvre du démantèlement de l’IRSN. Une réunion extraordinaire du comité social et économique de l’Institut est prévue ce 21 février, avant une assemblée générale de l’intersyndicale.

Elle a déjà le soutien du Crilan. « La suppression de l’IRSN va à l’encontre de l’exigence de sûreté en matière nucléaire. Ses travaux gênent l’accélération des procédures pour le développement des nouvelles constructions de réacteurs nucléaires, dans le droit fil des mesures déjà prises pour s’affranchir des règles en matière d’urbanisme et de protection de l’environnement », estime l’association antinucléaire.

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