Réacteurs à l’arrêt : EDF réduit son estimation de production nucléaire 2022

10 réacteurs sur 56 sont à l’arrêt, ce qui représente environ 20% de la capacité nucléaire française. Sur 5 d’entre eux, un problème de corrosion sur le système de sécurité a été détecté.

La centrale nucléaire de Penly, dans l'ouest de la France, également concernée par un problème de corrosion. AFP/Charly Triballeau.
La centrale nucléaire de Penly, dans l'ouest de la France, également concernée par un problème de corrosion. AFP/Charly Triballeau.

    Et de cinq. Ce jeudi, un problème de corrosion sur le système de sécurité d’un des réacteurs de la centrale nucléaire de Penly (Seine-Maritime) a été détecté, un nouveau déboire, alors que quatre autres réacteurs sont concernés par cet incident.

    L’incident a poussé le Groupe EDF a réduire sa prévision de production d’électricité nucléaire pour 2022 « à 300 - 330 TWh, contre 330 - 360 TWh », en raison « du prolongement de la durée d’arrêt de ces réacteurs ». En raison de fortes tensions sur le marché de l’électricité, la filière française est particulièrement scrutée, craignant que l’offre se tarisse.

    Les problèmes de corrosion s’accumulent et font craindre l’arrêt d’autres réacteurs. Jusqu’à présent, ce type d’incident n’avait été identifié que sur des réacteurs de 1 450 mégawatts. Le défaut détecté à Penly 1, un réacteur de 1 300 MW, est le premier qui concerne une autre famille de réacteurs.



    Le problème identifié à Penly « serait dû aussi à un phénomène de corrosion sous contrainte, c’est-à-dire le même phénomène qui a été détecté » sur les réacteurs de 1 450 MW, a précisé Karine Herviou, évoquant « un défaut de l’ordre du millimètre ».

    L’arrêt des quatre réacteurs de Civaux et de Chooz en plein mois de décembre, eux aussi touché par la corrosion avait privé la France de 10 % de sa capacité nucléaire et fait bondir les prix de l’électricité, déjà très élevés, sur le marché.

    « La réalisation des contrôles, l’instruction de solutions techniques et leur déploiement conduisent EDF à prolonger l’arrêt des réacteurs de Civaux 1, Civaux 2, Chooz 1, Chooz 2 et Penly 1″, a prévenu jeudi soir le groupe public d’énergie.

    Le gestionnaire du réseau RTE a renforcé dernièrement son niveau de vigilance sur l’approvisionnement de la France en électricité alors que la disponibilité du parc nucléaire, également chamboulée par la pandémie, est au plus bas.

    Combien de réacteurs sont-ils concernés ?

    La France, qui tire la grande majorité de son électricité du nucléaire, comptait jeudi 10 réacteurs indisponibles sur 56 et était privée de 20 % de ses capacités, au moment où la consommation est élevée avec la baisse des températures. La question est désormais de savoir si d’autres réacteurs du parc français sont concernés par ce problème de corrosion.

    « On ne sait pas s’il n’y a pas de problèmes ailleurs. EDF est en train de revoir tous les enregistrements » des contrôles effectués dans le passé sur le parc, a indiqué Karine Herviou. « Il est impossible d’exclure que d’autres réacteurs du palier 1 300 MW soient touchés », a jugé Yves Marignac, expert nucléaire de l’association NégaWatt.

    « Ce qui pose un problème difficile pour les autorités, qui est de savoir si on applique la même logique (que pour les réacteurs de 1,450 MW) et on ferme préventivement les réacteurs ou si on privilégie la sécurité électrique », a-t-il ajouté. Car « fermer davantage de réacteurs de 1,300 MW conduirait inévitablement à des ruptures d’approvisionnement ».



    Les nouveaux problèmes révélés jeudi interviennent à l’heure où la France s’interroge sur son avenir énergétique sur fond de montée des préoccupations autour du changement climatique. Le nucléaire est l’un des thèmes clivants de la campagne présidentielle, avec des candidats favorables à cette énergie (notamment à droite, à l’extrême droite mais aussi au PCF) et d’autres hostiles (LFI et EELV en particulier).

    Le président Emmanuel Macron, qui ne s’est pas encore déclaré candidat à un second mandat, a annoncé en novembre que la France allait lancer un nouveau programme de construction de réacteurs nucléaires. Elle n’en construit pour l’instant qu’un seul de nouvelle génération, l’EPR de Flamanville (Manche), qui a connu de nombreux retards. Le dernier vient d’être annoncé mercredi : le chargement du combustible a été repoussé de fin 2022 au second trimestre 2023, pour une facture alourdie de 300 millions d’euros.