En matière de sobriété, difficile de faire mieux que le siège de Citiz. Une maison de ville on ne peut plus banale sur une avenue tout aussi banale de Strasbourg. Une fois la porte d’entrée franchie, un gros chien (gentil) vous accueille, devançant le maître des lieux, Jean-Baptiste Schmider. Au mur de son bureau, le fondateur de l’un des principaux acteurs français de l’autopartage a punaisé une feuille A4 où il est écrit la raison d’être de son entreprise : « Citiz aspire à une société sobre et coopérante, où les individus partagent des biens et des services pour permettre à chacun de se déplacer dans le respect de la planète et la préservation des ressources. »
Citiz, c’est l’histoire d’un groupe d’amis qui prennent conscience, au début des années 2000, des contraintes du coût de leur automobile. Et décident de faire autrement. « J’avais une voiture, mais je m’en servais si peu que j’oubliais où je l’avais garée, raconte M. Schmider. La troisième fois que je suis allé la chercher à la fourrière, je me suis dit : “ça suffit” . » Les débuts sont très amateurs (quelques véhicules, une armoire à clé, un téléphone d’astreinte), pour aboutir, deux décennies plus tard, à 1 700 voitures, 60 000 utilisateurs dans 160 communes françaises, le tout coordonné par une application mise au point par des développeurs maison.
Pris pour de gentils « fadas » il y a vingt ans, les aventuriers de Citiz font désormais figure de précurseurs dans un monde et un pays où l’urgence climatique et la planification écologique sont à l’ordre du jour. Or, la mobilité constitue un levier majeur pour changer la donne en matière d’incidence climatique. C’est particulièrement vrai en France, où elle constitue la première source d’émission de gaz à effet de serre, à savoir 135 millions de tonnes (hors liaisons aériennes internationales) en 2019, soit 31 % du total. Les voitures et les camionnettes comptent pour 70 % de ces 135 millions, suivies des poids lourds (23 %), des avions (vols intérieurs seulement, 4 %), des deux-roues (2 %), des bateaux (1 %) et des trains (0,3 %).
Surtout, le transport est le seul secteur à avoir augmenté ses émissions de CO2 par rapport à 1990. La courbe montre une décennie de forte hausse jusqu’en 2000, puis une baisse pendant cinq ans, due à l’introduction des agrocarburants, et, enfin, une stagnation depuis quinze ans. Les énergies motrices de la mobilité sont le pétrole et les hydrocarbures fossiles pour 92 %, les agrocarburants pour 6 % et l’électricité pour 2 %, ultramajoritairement consommée par le train.
Il vous reste 75.46% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.