L’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) veut des décisions sur les déchets pour 2025
L’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) a présenté son bilan annuel le 21 janvier, en insistant longuement sur la nécessité de prendre des décisions sur la gestion des déchets radioactifs.
Il y a des progrès et des marges de progression… En 2020, EDF a dû assurer la maintenance de ses centrales nucléaires, tout en gérant la crise sanitaire. Le bilan de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) était attendu, après cette période intense pour les entreprises. Jeudi 21 janvier, lors de ses vœux annuels, le gendarme de la filière a salué un niveau de sûreté et de radioprotection "globalement satisfaisant". Il a toutefois signalé plusieurs points de vigilance, notamment sur le retard de certains chantiers et la gestion des déchets nucléaires.
“Une situation tendue” avec la crise sanitaire
Lors de ses précédents vœux, l’ASN avait fait un état des lieux assez sévère, en fustigeant des "déficiences industrielles". Douze mois plus tard, l’autorité note des progrès "en matière de rigueur d’exploitation, notamment chez EDF". L’ASN estime aussi que "les exploitants et les responsables d’activité ont fait preuve d’une grande réactivité et d’une bonne capacité d’adaptation" face à la pandémie.
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Pas question pour autant de relâcher sa vigilance. "La crise sanitaire n’est pas terminée, tempère le gendarme du nucléaire. Le report de nombreuses activités conduit à une situation tendue, qui perdure, tant pour les exploitants nucléaires que pour les responsables d’activité utilisant les rayonnements ionisants." L’ASN a également regretté chez EDF "une régression dans la prise en compte de la radioprotection des travailleurs", "la persistance d’écarts affectant des matériels chez Orano" et des améliorations "encore trop lentes" dans la reprise et le conditionnement des déchets anciens au Commissariat à l'énergie atomique (CEA).
Une forte charge de travail liée au grand carénage
Sur le "grand carénage", l’ASN a fait un point d’étape plutôt positif. Ce vaste programme de maintenance, aussi appelé quatrième réexamen périodique, doit permettre de prolonger de 40 à 50 ans l’activité de 32 réacteurs nucléaires de 900 MW. D’où un calendrier de travaux assez chargé en 2020. "À ce stade, l’ASN considère que les dispositions prévues par EDF [...] permettront d’atteindre les objectifs du réexamen", écrit l’autorité.
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Le président de l’ASN, Bernard Doroszczuk, a toutefois décrit une importante charge de travail pour ses équipes et les industriels : "Nous allons devoir réévaluer cette charge de travail au vu du retour d’expérience des premiers réexamens de tranche et au vu de la future échéance d’instruction et de contrôle des réexamens des réacteurs de 1300 MW qui vont commencer à partir de 2021 [...] et qui viendront se surajouter aux réexamens de 900 MW."
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L’ASN veut des décisions sur les déchets nucléaires
Le patron de l’ASN s’est montré plus insistant sur la question des déchets nucléaires, en alertant sur les capacités limitées du Centre de stockage de Morvilliers (Aube). "Sa capacité peut-être aménagée et légèrement augmentée. Mais elle est nettement inférieure, de moitié au moins, à ce qui serait nécessaire pour accueillir la totalité des déchets de très faible activité qui résulteront du démantèlement des installations nucléaires", a averti Bernard Doroszczuk.
Le président de l’ASN a appelé à une prise de décision rapide, à l’occasion du cinquième plan national de gestion des matières et déchets radioactifs (PNGMDR), qui s’étend de 2021 à 2025. La concertation publique sur le sujet doit se terminer en février. "C’est toujours très long de passer de la décision à la réalisation", a rappelé Bernard Doroszczuk. "À défaut de choix, au cours de ce jalon clé que constitue le cinquième PNGMDR, aucune filière de gestion pérenne des déchets ne sera opérationnelle dans les vingt ans qui viennent", s’est inquiété le président.
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Les acteurs du secteur ont déjà produit de denses études sur le sujet. L'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra) souhaite stocker une partie des déchets nucléaires en souterrain (projet Cigéo). Une solution controversée. De son côté, EDF mène un projet de piscine centralisée pour ses combustibles usés. "On sait d'ores et déjà, de nos discussions avec EDF, que ce projet ne sera pas au rendez-vous de 2030, a indiqué Anne-Cécile Rigail, directrice générale adjointe à l’ASN. Le collège a demandé à EDF de travailler sur des parades pour pouvoir faire face techniquement aux entreprosages de combustibles usés." Le président de l’ASN a répété à plusieurs reprise son vœu pour la nouvelle année : "Il est indispensable que des choix soient faits."