Nucléaire : un projet de loi pour accélérer la construction de réacteurs présenté en Conseil des ministres

En parallèle, une consultation publique sur la construction des six réacteurs EPR, voulus par Emmanuel Macron, a été lancée le 27 octobre.

Emmanuel Macron a annoncé la construction de six réacteurs EPR de nouvelle génération, avec une option pour huit autres (Illustration). LP/Matthieu de Martignac
Emmanuel Macron a annoncé la construction de six réacteurs EPR de nouvelle génération, avec une option pour huit autres (Illustration). LP/Matthieu de Martignac

    Un projet de loi visant à accélérer la construction de réacteurs nucléaires est présenté ce mercredi en Conseil des ministres, au moment où commence le débat public sur la place de l’atome en France. Alors que le besoin d’électricité va croître pour permettre au pays de s’extraire des énergies fossiles, le président Emmanuel Macron soutient la construction de six réacteurs EPR de nouvelle génération, avec une option pour huit autres, et l’essor des énergies renouvelables, solaire et éolien marin d’abord.

    Ce texte sera examiné début 2023, d’abord à l’Assemblée nationale, a indiqué le ministère de la Transition énergétique. À partir de ce même mercredi, un projet de loi pour accélérer sur les renouvelables, dont le déploiement accuse un retard criant, doit être examiné par le Sénat.

    « Si nous voulons à la fois avoir une indépendance énergétique mais également tenir nos objectifs climatiques, il faut remplacer les énergies fossiles par des énergies bas carbone. Le nucléaire est aujourd’hui l’énergie le plus bas carbone de toutes les solutions dont nous disposons », a justifié vendredi la ministre Agnès Pannier-Runacher, à la centrale de Chinon (Indre-et-Loire).

    Procédures administratives simplifiées

    Installés sur les sites de centrales déjà existantes, les futurs EPR seraient implantés, pour les deux premiers, à Penly (Seine-Maritime) puis Gravelines (Nord). La localisation de la troisième paire de réacteurs n’est pas tranchée, la vallée du Rhône (Bugey ou Tricastin) est envisagée.

    VIDÉO. Nucléaire : Macron annonce la construction de six EPR2 de nouvelle génération

    Le projet de loi présenté mercredi vise à « gagner du temps », en simplifiant les procédures administratives : par exemple, les sites seraient dispensés d’autorisation d’urbanisme car le contrôle de conformité serait assuré par les services de l’État. Les projets répondront à « une raison impérative d’intérêt public majeur, leur permettant de bénéficier d’une des conditions d’octroi des dérogations relatives aux espèces protégées », stipule-t-il. Et les travaux sur les bâtiments non destinés à recevoir des substances radioactives pourront être réalisés avant clôture de l’enquête publique.

    Emmanuel Macron pourrait ainsi en poser la première pierre avant la fin de son mandat en 2027, même si la mise en service de ce premier EPR ne pourrait se faire avant 2035 voire 2037. Consulté obligatoirement pour avis, le Conseil national de la transition écologique (CNTE), qui regroupe syndicats, patronat, ONG… a « regretté les délais insuffisants » qui lui ont été laissés pour se prononcer sur ce projet de loi. Le CNTE note en outre que ce texte de loi « ne saurait préjuger des conclusions du débat public ».



    Les associations environnementales en particulier avaient réagi avec colère à la réception soudaine de ce projet. « Le passage en force sous de faux prétextes d’urgence à court terme n’est pas acceptable », avait dit Allain Bougrain-Dubourg, de la Ligue de protection des oiseaux (LPO), déplorant « une parodie de consultation » et l’absence d’étude d’impact du nucléaire sur « la faune aquatique et les mortalités massives d’oiseaux ».

    Débat public depuis le 26 décembre

    Ce projet de loi « ne préempte pas les concertations en cours ni les futures lois énergie climat qui décideront » in fine, a assuré le ministère lundi. « Nous souhaitons avoir une adhésion des populations et des élus », a insisté Agnès Pannier-Runacher.

    Les parlementaires devront de fait voter à compter du second semestre 2023 la stratégie énergie climat de la France. D’ici là, les Français pourront s’exprimer. Un débat public sur la construction des six EPR, obligatoire pour le porteur de projet EDF, a en effet commencé le 27 octobre et durera jusqu’au 27 février. Dans le même temps, une autre concertation plus large sur l’énergie est organisée par le gouvernement jusqu’au 31 décembre, notamment en ligne (concertation-energie.gouv.fr).

    Ces deux processus, dont les synthèses seront livrées aux parlementaires, pourront s’appuyer sur les scénarios à 2050 du gestionnaire du réseau RTE et de l’Ademe. Tous ces scénarios incluent une poussée des énergies renouvelables, avec une part variable de nucléaire (ou pas de nucléaire du tout, ce qui toutefois obligerait à des mesures très volontaristes de sobriété). La France, qui dépend du nucléaire pour environ 70 % de son électricité, avait décidé en 2015 de diversifier ses sources d’approvisionnement en fermant 14 de ses 58 réacteurs (deux ont déjà fermé), avant un revirement annoncé par Emmanuel Macron fin 2021.