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Site d’enfouissement de Bure : « On ne nous atomisera jamais »

L’opposition au centre d’enfouissement des déchets radioactifs dans la Meuse s’enracine. Mais les quelques dizaines d’habitants clandestins du bois Lejuc sont sous le coup d’une expulsion.

Par  (Bure (Meuse) envoyé spécial)

Publié le 11 janvier 2017 à 10h39, modifié le 11 janvier 2017 à 19h18

Temps de Lecture 5 min.

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Près de Bure (Meuse), les opposants à l’enfouissement des déchets nucléaires ont fait des semis sur des terres de l’Andra.

Ce matin de janvier, le village de Bure (82 habitants), aux confins de la Meuse et de la Haute-Marne, est figé sous un glacis de poudre blanche. A un vol de corneille, le bois Lejuc, théâtre à l’été 2016 d’une guérilla champêtre, semble abandonné aux sangliers et aux chevreuils, dont les traces se dessinent dans la neige fraîche. D’autres occupants sont pourtant présents, furtifs et insaisissables.

En levant les yeux, on aperçoit, perchée sur la fourche d’un grand chêne, une plate-forme recouverte d’une bâche. De là-haut, la vue est imprenable sur le pays de Bure. Non loin, l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra) a creusé un laboratoire souterrain préfigurant le Centre industriel de stockage géologique (Cigéo), pour les rebuts les plus dangereux de l’industrie atomique. Et c’est ici, à l’aplomb de cette forêt, qu’elle veut enfouir dans l’argile, à 500 m de profondeur, 85 000 m3 de déchets de haute activité et à vie longue – des centaines de milliers d’années pour certains. Des résidus issus du parc nucléaire hexagonal, mais aussi des activités de recherche et du secteur de la défense, pour l’instant entreposés à la Hague (Manche), Marcoule (Gard) ou Cadarache (Bouches-du-Rhône).

Camp retranché

Un jeune Robin des bois a passé la nuit à ce poste de vigie. « Ici, lance-t-il, je me sens utile. Je me bats contre l’Andra et son monde, contre Vinci [maître d’œuvre du projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes] et son monde. » Mado, un prénom d’emprunt, s’est formée elle aussi à la grimpe et au rappel, avant d’initier d’autres volontaires. Ces maisons des cimes, dit-elle, sont « le moyen le plus efficace de lutter contre la réoccupation de la forêt par l’Andra ».

Pour s’opposer aux travaux de l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs, des militants ont construit des cabanes dans les bois.

Les quelques dizaines d’habitants clandestins du bois Lejuc le savent, ils sont sous le coup d’une expulsion. L’un d’eux, installé dans une cabane de planches et de palettes bâtie sur deux niveaux, avec laine de verre, paille, matelas et poêle à bois, était assigné en référé devant le tribunal de Bar-le-Duc, mercredi 11 janvier. L’audience a été reportée, mais tôt ou tard, l’Andra obtiendra l’évacuation des lieux. L’avocat des anti-Cigéo, Me Etienne Ambroselli, espère gagner du temps, jusqu’à la fin de la trêve hivernale. « Construire ici son habitation, c’est un acte fort, politique, philosophique et même spirituel », plaide-t-il.

En attendant, les contestataires ont repris possession de la forêt, qu’ils avaient déjà investie pendant trois semaines, au début de l’été, avant d’être délogés par les gendarmes mobiles. Des nacelles aériennes ont été échafaudées, des toilettes sèches aménagées, et une cantine sert de point de ralliement. Un gaillard en treillis, le visage enturbanné, monte la garde. « Faire un gros trou pour y mettre les déchets nucléaires est une idée folle, pense-t-il. S’il y a une fuite, à 500 m sous terre, ça sera ingérable. Les eaux souterraines risquent d’être contaminées, répandant la mort. » Aucun pays n’a encore mis en œuvre la solution de l’enfouissement. Aux Etats-Unis, un incendie et un relâchement de radioactivité se sont produits en 2014 dans le Waste Isolation Pilot Plant (WIPP), un site de stockage de déchets militaires implanté au Nouveau-Mexique, au milieu d’une couche de sel, à 650 m de profondeur.

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