La filière française du nucléaire tient ici la promesse d’une relance historique. Mais une promesse aux modalités de financement encore incertaines. Combien coûteront les futurs réacteurs de troisième génération (entre 6 et 14 d’ici à 2050) annoncés par Emmanuel Macron, et comment lever les fonds adéquats ? Le chef de l’Etat a laissé cette question dans le flou, jeudi 10 février à Belfort, à deux mois de l’élection présidentielle. « Des financements publics massifs de plusieurs dizaines de milliards d’euros seront engagés afin de financer ce nouveau programme », a-t-il simplement indiqué.
Le seul chantier lancé depuis 2007 enchaîne jusqu’à aujourd’hui retards, surcoûts et critiques. Aux dernières nouvelles, le réacteur EPR de Flamanville (Manche) entrerait en service en 2023. Ses coûts de construction ont quasiment quadruplé, pour atteindre 12,7 milliards d’euros. Sans parler des frais intercalaires (les intérêts d’emprunt), qui devraient porter l’enveloppe totale à près de 20 milliards d’euros, d’après un rapport de la Cour des comptes.
Les prochaines ardoises seront moins douloureuses, selon les projections. Avec l’effet de série pour les six premiers chantiers à venir, trois paires de réacteurs EPR 2, les estimations provisoires oscillent entre 46 milliards et 64 milliards d’euros. Soit un montant unitaire compris entre 7,7 et 10,7 milliards.
Une intervention de l’Etat actionnaire
EDF, dont l’Etat est l’actionnaire majoritaire, a construit le parc actuel – principale source d’électricité dans le pays – grâce à des emprunts bancaires ou à de l’autofinancement : 56 unités mises en service entre les années 1970 et 1990. Elle a aussi entrepris les travaux de « Flamanville 3 » sur ses seuls fonds propres. Pour les chantiers à venir, ce scénario paraît compromis, au regard du lourd endettement de l’entreprise : 41 milliards d’euros, selon le décompte de juin 2021.
En janvier, la banque américaine JPMorgan conseillait une recapitalisation, pour à la fois garantir l’entretien d’un parc vieillissant et envisager de nouvelles installations. « EDF doit disposer d’une structure financière suffisamment robuste pour faire face au mur d’investissements que constitue ce nouveau programme nucléaire », souligne un syndicaliste, Alexandre Grillat, secrétaire national aux affaires publiques à la fédération CFE-CGC Energies.
Dès à présent, l’entreprise réfléchit à « plusieurs options de financement » pour les futurs réacteurs, selon son PDG, Jean-Bernard Lévy. Les hypothèses de travail prévoient une intervention de l’Etat actionnaire, « soit directement, soit à travers des garanties ». Voire, cette fois, la participation « d’investisseurs privés ».
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