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Nucléaire : EDF face au chantier plein d'incertitudes des réacteurs touchés par la corrosion

La corrosion identifiée sur les réacteurs d'EDF serait liée à des défauts de conception. Alors que la tension se renforce pour assurer l'approvisionnement en électricité l'hiver prochain, la liste des travaux à réaliser reste encore incertaine.

Les deux réacteurs de la centrale de Civaux sont touchés par la corrosion.
Les deux réacteurs de la centrale de Civaux sont touchés par la corrosion. (Pierre GLEIZES/REA)

Par Sharon Wajsbrot

Publié le 10 avr. 2022 à 08:46Mis à jour le 11 avr. 2022 à 09:50

Les réacteurs d'EDF seront-ils prêts à tourner à plein régime l'hiver prochain ? Cinq mois après la découverte des premières traces de corrosion sur les tuyaux du réacteur numéro un de la centrale de Civaux, en Nouvelle-Aquitaine, cette question cruciale pour l'approvisionnement en électricité des Français est toujours en suspens.

« De nombreuses activités de contrôle des réacteurs sont encore en cours chez EDF. L'identification du périmètre du phénomène se poursuit », confirme aux « Echos » le directeur général adjoint de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN), Julien Collet. Autrement dit, à ce stade, EDF n'a pas encore identifié de façon définitive la liste des réacteurs qu'il lui faudra réparer.

Depuis le début des investigations sur les réacteurs touchés par ces fissures sur les tuyauteries du système d'injection de sécurité - celui qui doit permettre d'injecter, en cas de fuite, de l'eau borée pour refroidir le réacteur et éviter son entrée en fusion - une certitude commence à émerger. « L'hypothèse centrale est désormais celle d'un défaut de conception et non pas d'un problème lié à l'exploitation des réacteurs », indique ce dernier.

Identifier le périmètre du phénomène

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Dans ce contexte, une bonne nouvelle pourrait émerger. « Les éléments qu'EDF a apportés tendent à montrer que les réacteurs de 900 MWh pourraient être moins concernés, voire pas concernés » par ce problème de corrosion , observe Julien Collet. Il explique notamment que leur conception différente n'induirait pas les mêmes phénomènes physiques.

Le sujet est capital pour EDF. Car cette génération de réacteurs est la plus ancienne encore exploitée en France mais, surtout, la plus répandue. Sur les 56 exploités par l'énergéticien dans l'Hexagone, 32 appartiennent à ce type de technologie.

Pour confirmer cette hypothèse, deux opérations de découpes de tuyauterie doivent être réalisées. L'une a déjà eu lieu dans la centrale de Fessenheim, dont les réacteurs arrêtés sont mis à profit pour ces tests et l'autre doit être réalisée dans la centrale de Chinon. « Nous sommes en attente de visibilité sur les contrôles : dans les prochaines semaines nous devrions savoir si les réacteurs de 900 MW sont concernés ou pas », espère Julien Collet.

Evaluer l'ampleur des dégâts

En attendant, EDF travaille aussi à mesurer l'ampleur des phénomènes de corrosion sur les réacteurs où elle a été à coup sûr identifiée, c'est-à-dire sur les deux autres générations de réacteurs en exploitation, les « N4 » et les « 1.300 MW ». « EDF a identifié des réacteurs de référence sur chaque palier technologique pour réaliser des études, des découpes et des analyses », confirme le directeur général adjoint de l'ASN.

Au total, sept réacteurs (les deux de Civaux, de Chooz, le réacteur numéro un de Penly, le réacteur numéro deux de Fessenheim et le réacteur B3 de Chinon) doivent subir des découpes sur leurs tuyauteries pour évaluer l'ampleur des dégâts. A Civaux, c'est même l'ensemble d'une « branche froide du circuit d'injection de sécurité » qui va être déposée pour regarder jusqu'où pénètre la corrosion.

Ces circuits découpés sont autant de pièces qu'EDF devra réparer pour redémarrer ces réacteurs. Mais la liste pourrait s'allonger. Cinq autres réacteurs (les numéros un et deux de Flamanville, trois et quatre de Bugey et trois à Cattenom) pourraient aussi être concernés par des découpes. Celles-ci seront décidées en fonction des résultats des nouveaux contrôles indique l'ASN.

Nouveau risque sur la production

Cette incertitude sur l'ampleur des travaux à mener fait peser un nouveau risque sur la production d'électricité cet hiver. Le sujet est d'autant plus sérieux qu'il n'y a quasiment plus de marges pour faire face à la demande. Compte tenu des incertitudes sur l'approvisionnement en gaz russe mais surtout des prévisions de production d'électricité extrêmement faibles et inédites d'EDF.

« Les dates de retour des réacteurs sur le réseau dépendent de l'ampleur des réparations qui seront à mener et il y a une certaine incertitude sur ce sujet », confirme Julien Collet, qui pointe des réparations qui représentent « un enjeu industriel lourd pour EDF ».

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De fait, l'entreprise publique fait déjà face à des ressources sous tension. Que ce soit du fait des difficultés d'approvisionnements en matière première ou à cause des multiples chantiers déjà en cours sur son parc des réacteurs en France.

« Il y a quelques semaines, EDF ne pouvait pas assurer qu'il serait capable de s'approvisionner en matière première, en acier inoxydable notamment » pour réparer les circuits découpés dans les réacteurs touchés par le phénomène de corrosion, explique une source au sein des pouvoirs publics. Aujourd'hui, cette incertitude semble levée : « EDF a sécurisé des commandes de matière », atteste Julien Collet à l'ASN.

Reste toutefois, la question de la main-d'oeuvre. « On manque de soudeurs, on va devoir arbitrer nos chantiers prioritaires », prévient une source syndicale qui indique que des scénarios sont à l'étude pour rediriger « des salariés qui travaillent sur le chantier de l'EPR de Flamanville vers la centrale de Civaux ».

Sharon Wajsbrot

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