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"Le numérique n'a pas été pris au sérieux par les responsables de Kodak"

Auteur de "La Chute de l'empire Kodak", François Sauteron a travaillé trente-trois ans au sein de l'entreprise pionnière, aujourd'hui au bord de la faillite.

Par Elise Barthet

Publié le 06 janvier 2012 à 10h20, modifié le 09 avril 2012 à 12h15

Temps de Lecture 2 min.

Un utilisateur d'un ancien appareil Kodak.

François Sauteron a travaillé trente-trois ans chez Kodak, entre 1956 et 1990. Il est l'auteur de La Chute de l'empire Kodak, publié en 2010 aux éditions L'Harmattan.

Depuis sa création en 1880 jusque dans les années 1990, Kodak a régné sur la photographie. Pourquoi l'entreprise a-t-elle raté le tournant du numérique ?

Le cœur de métier de Kodak est longtemps resté la chimie. Tout ce qui touchait à l'électronique pure était perçu comme relevant du "gadget". Quand il a commencé à émerger, le numérique n'a pas été pris au sérieux par les responsables de l'entreprise. De grands progrès avaient été faits en matière de photographie argentique dans les années 1970-1980. Les pellicules étaient de plus en plus sensibles aux faibles lumières. Le grain, plus fin. Kodak disposait de dizaines de milliers de brevets et, pendant des décennies, la société a profité d'un statut de quasi-monopole. Aux yeux de ses dirigeants, Kodak semblait insubmersible. Ils ont sans doute péché par orgueil, persuadés que l'entreprise réussirait à imposer dans la durée sa vision de l'image.

D'autres erreurs ont-elles été commises ?

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A deux reprises, au moins, Kodak a tourné le dos à des innovations, qui ont fini par lui coûter cher. D'abord, elle a éconduit en 1945 un certain Chester Carlson, qui fonda par la suite la société Xerox, à l'origine des premiers photocopieurs. Cinq ans après cet épisode, l'entreprise mit à la porte un autre inventeur, Edwin Land, venu présenter un nouveau procédé de développement photographique, le Polaroïd. Après quatorze ans de procès, en 1991, Kodak fut condamné à verser près d'un milliard de dollars à la société fondée par Edwin Land pour contrefaçon de licence.

Du lecteur CD de photos à l'imprimante EasyShare, l'entreprise a pourtant investi dans le numérique...

Oui, mais c'est arrivé trop tard. L'argentique était extrêmement rentable jusque dans les années 1980. Kodak dégageait des bénéfices à deux chiffres et, plutôt que d'investir massivement dans l'électronique, l'entreprise s'est diversifiée. Elle a racheté au prix fort des dizaines de sociétés qu'elle pensait prometteuses, dépensant à tout va. Pendant ce temps, Xerox prospérait, FujiFilm aussi. L'action de Kodak a commencé à baisser, le groupe à licencier. Plus tard, Daniel Carp – PDG de 1999 à 2005 – a essayé de redresser la barre en nommant à des postes-clés des anciens d'Olympus et de Hewlett-Packard, mais le déclin était déjà engagé. Le lecteur CD s'est avéré être un échec. Quant à l'imprimante, son succès n'a pas duré.

D'autres légendes de l'image, comme Leica, ont réussi à se redresser après avoir évité de peu la banqueroute. Qu'est-ce qui a manqué finalement à Kodak ?

C'était une entreprise à la fois très ample et très spécialisée, qui manquait terriblement de souplesse. Elle a fait de mauvais investissements au mauvais moment. Ce ne sont pas les brevets numériques dont elle dispose aujourd'hui qui lui sortiront la tête de l'eau. Beaucoup sont déjà dépassés.

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