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« La politique énergétique doit faire l’objet d’un débat ouvert »

Emmanuel Macron ne peut pas, seul, décréter la relance du programme nucléaire français, rappellent l’ancien haut fonctionnaire Michel Badré et l’économiste Alain Grandjean, dans une tribune au « Monde ». Le peuple et le Parlement doivent se prononcer sur le sujet.

Publié le 22 février 2022 à 06h30, modifié le 22 février 2022 à 06h39 Temps de Lecture 4 min.

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Tribune. Le président de la République, probable candidat à sa réélection, a annoncé le 10 février 2022 sa volonté de lancer un nouveau programme nucléaire et de développer, dans le même temps, les énergies renouvelables. Cette annonce éclaire les électeurs sur ses intentions, ce qui est une bonne chose.

Mais elle ne peut pas constituer une relance du nucléaire en tant que telle. En effet, cette décision ne dépend pas du président de la République actuel ou futur, mais du Parlement. La législation prévoit qu’une loi sera adoptée au premier semestre 2023 pour arrêter ces orientations. Elles seront ensuite précisées par une nouvelle « programmation pluriannuelle de l’énergie » qui se substituera à l’actuelle, arrêtée par décret en 2020.

La Constitution encadre la préparation d’un tel texte. L’article 7 de la charte de l’environnement (2005), indique, en effet, que « toute personne a le droit (…) d’accéder aux informations relatives à l’environnement détenues par les autorités publiques et de participer à l’élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l’environnement ».

Réacteurs à l’arrêt

Citons quelques-unes des questions posées par l’élaboration de ce texte :

  • La priorité concerne les efforts de sobriété énergétique, dans tous les domaines, qui doivent être réalisés avant la prise de décision politique permettant le transfert des énergies fossiles à l’électricité. Quels moyens permettront, en la matière, de suivre des trajectoires compatibles avec les objectifs des politiques climatiques dès 2030 et jusqu’à 2050 ?
  • Les réacteurs EPR, dont la construction est aujourd’hui envisagée, n’auront d’effets sur la production électrique qu’aux environs de 2040. D’ici là, seuls les réacteurs actuels et les énergies renouvelables répondront au besoin supplémentaire d’électricité. Comment sera assurée la forte accélération de la production d’énergie éolienne et solaire sur cette période ?
  • Cet hiver, EDF et l’Autorité de sûreté nucléaire ont alerté sur un risque d’insuffisance de la production électrique. Il ne résulte pas de l’intermittence des énergies éoliennes et solaires (qui ne fournissent que 10 % environ de la production), mais de mises à l’arrêt de près de 20 % du parc nucléaire existant pour des questions techniques relatives à la sûreté. Ces difficultés ne sont pas imputables au vieillissement du parc : les quatre premiers réacteurs arrêtés pour plusieurs mois, à Chooz (Ardennes) et Civaux (Vienne), sont les plus récents, mis en service à la fin des années 1990, et les plus puissants. Comment se prémunir contre la répétition de tels incidents ?
  • Le réacteur EPR de Flamanville (Manche) était présenté, lors du débat public de 2006, comme une « tête de série », prototype des futurs réacteurs à développer. Avant de lancer les EPR2 [une version « optimisée » de l’EPR dont la construction a été annoncée par Emmanuel Macron], peut-on se dispenser d’un retour d’expérience sur la construction de ce premier EPR, qui accuse une douzaine d’années de retard et une multiplication par au moins cinq de son coût initial ?
  • On a reproché aux concepteurs du programme nucléaire actuel, il y a cinquante ans, de ne pas s’être préoccupés du traitement des déchets, et en particulier des plus dangereux. Le projet de stockage géologique Cigéo, à Bure (Meuse), dont la gestation est complexe et le coût prévisionnel très élevé, vise à répondre à cet impératif. Son dimensionnement est explicitement prévu pour traiter les déchets les plus radioactifs issus du seul parc actuel. Qu’en sera-t-il du traitement des déchets issus du parc futur ?
  • Les coûts de production futurs différeront fortement des coûts actuels, calculés sur la base de réacteurs nucléaires amortis et de production solaire et éolienne en cours de développement. Les évaluations faites par la Cour des comptes, le Réseau de transport d’électricité (RTE) et l’Ademe (Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie) fournissent beaucoup d’éléments sur cette question dont il est important de débattre.
  • Enfin, le montant considérable des investissements nécessaires à la transition énergétique, quel que soit le scénario retenu, impose une vision claire des moyens de financement mis en place. Ce point concerne directement l’avenir de l’opérateur public qu’est EDF, mais aussi plus généralement les finances publiques, et nécessite donc un débat.

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