Hydrogène bas carbone : Macron ajoute 1,9 milliard d’euros pour soutenir la filière

Le chef de l’Etat a affirmé ce mardi à Béziers (Hérault) qu'1,9 milliard d'euros seront consacrés au développement de la filière hydrogène dans le cadre du plan France 2030, afin de décarboner sa production. De quoi justifier la volonté de l'exécutif de relance du nucléaire, alors que le chef de l'Etat compte sur l’électricité bas carbone délivrée par l’atome pour alimenter les électrolyseurs.
Marine Godelier
(Crédits : Reuters)

Un mois après la présentation en grande pompe de son plan de relance de l'industrie tricolore « France 2030 », Emmanuel Macron continue d'essaimer les annonces sur les investissements prévus dans ce cadre. Jusqu'ici, parmi l'enveloppe totale de 30 milliards d'euros, un milliard était déjà consacré au soutien des SMR, ces petits réacteurs nucléaires modulaires principalement destinés à l'export, et 500 millions aux énergies renouvelables. Mais ce n'est pas tout : le chef de l'Etat a indiqué qu'il comptait mettre les gaz sur une autre solution, dans laquelle il espère faire de l'Hexagone un « leader » mondial : l'hydrogène bas carbone.

Alors qu'il visitait ce mardi à Béziers l'entreprise Genvia, qui développe des électrolyseurs à haute température (permettant de produire de l'hydrogène à partir de molécules d'eau), le président de la République a ainsi annoncé mettre 1,9 milliard d'euros sur la table afin de déployer ce genre d'initiatives, et de soutenir une filière naissante. Un montant qui s'ajoutera à celui du plan hydrogène de 7 milliards d'euros déjà annoncé en 2020 via le plan de relance, dont le but était d'appuyer une production rentable et bas carbone de ce gaz, mais aussi d'en démocratiser les usages.

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L'entreprise Genvia elle-même sera soutenue à hauteur de 200 millions d'euros par l'Etat via un projet important d'intérêt commun européen (IPCEI). « L''idée est d'avoir les capacités de développer au moins cinq gigafactories d'électrolyseurs sur le territoire », explique-t-on à l'Elysée. Et permettre ainsi d'économiser 6 mégatonnes de CO2 par an, soit l'équivalent des émissions de la ville de Paris. De manière globale, grâce à cette nouvelle enveloppe, l'objectif sera de créer « au moins deux gigafactories » d'électrolyseurs sur le territoire d'ici à 2030, selon des technologies différentes, a précisé Emmanuel Macron. Sur le plus long terme, cinq de ces usines sont prévues, ce qui permettrait de créer « de 50 à 100.000 emplois d'ici à 2030 » dans tout le secteur, ajoute l'Elysée.

Corrélation avec l'électricité nucléaire 

L'annonce n'est pas surprenante. Car le chef de l'Etat avait déjà mis en avant, lors de sa présentation du plan France 2030, le rôle majeur que devra jouer l'hydrogène dans le futur pour décarboner les procédés industriels. Et ce, via une production directement sur le territoire français plutôt que par le biais d'importations, avait-il fait valoir. « Parce que nous avons des atouts » pour déployer cette « technologie d'avenir », avait alors souligné le chef de l'Etat, fort du parc nucléaire historique développé par l'Hexagone.

« Pour lui, il y a une corrélation directe entre l'électricité nucléaire et la production d'hydrogène. C'est un choix politique clair, différent de celui de l'Allemagne qui souhaite l'importer », commente Benjamin Boiton, associé au cabinet Adaltys.

Pour cause, la production d'hydrogène « vert » par électrolyse de l'eau nécessite l'utilisation d'une grande quantité d'électricité afin de séparer les molécules H et O, qui se doit donc d'être bas carbone. Et si ce courant peut être issu des énergies renouvelables, il peut aussi provenir de la fission de l'atome - qui émet peu de gaz à effet de serre, n'a pas manqué de rappeler le président de la République. Avec ses 56 réacteurs nucléaires, l'Hexagone pourrait donc « produire de l'hydrogène beaucoup plus massivement », de manière à « construire la souveraineté » énergétique du pays, a-t-il précisé.

« Nous n'aurons jamais suffisamment d'énergies renouvelables [sur notre territoire] pour produire de l'hydrogène vert», a-t-il insisté.

Une production encore très polluante

De quoi renforcer un peu plus encore l'importance du premier point de son plan d'investissement sur les SMR, et sa décision récente de relancer le nucléaire sur le territoire, même si aucun plan précis de construction d'EPR n'a été dévoilé. D'autant que le chef de l'Etat, s'il n'a pas encore annoncé son éventuelle candidature, cherche à se présenter comme le chef de file du camp progressiste face à ceux qui affirment que la France est en déclin.

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L'hydrogène va « permettre de réconcilier l'aventure industrielle, la croissance, avec la décarbonation de nos économies. Le 'en même temps' est possible grâce à ces innovations », a ainsi expliqué Emmanuel Macron en s'adressant aux employés du site de Genvia.

Mais il aura fort à faire : pour l'heure, l'écrasante majorité de l'hydrogène utilisée dans l'industrie provient en fait du vaporeformage du méthane, une réaction tout sauf « verte » d'hydrocarbures fortement émettrice de gaz à effet de serre. Le gaz « gris » ainsi obtenu coûte environ 1,5 € le kilogramme, contre quatre à cinq fois plus environ pour celui issu d'un procédé d'électrolyse. Avant de passer à l'échelle et de rendre la filière compétitive, le chemin semble encore long.

Flexibilité

L'annonce intervient alors que le géant français Engie a présenté ce mardi sa stratégie d'accélération dans l'hydrogène bas carbone, où il compte se positionner comme un acteur majeur de la décarbonation de l'industrie et des transports lourds, avant de se lancer dans les réseaux d'infrastructure européens. Concrètement, le groupe prévoit de parvenir à 0,6 GW de capacité de production électrique dans le monde d'ici 2025 via l'hydrogène, et 4 GW en 2030.

« La filière des électrolyseurs est en pleine construction en France, mais le module le plus gros actuellement n'offre qu'une puissance de 17 mégawatt, ce qui est très peu », a noté le responsable de la stratégie hydrogène du groupe, Sebastien Arbola.

Se félicitant d'un « contexte politique favorable », Engie espère massifier les procédés, afin que l' « hydrogène vert puisse concurrencer le gris dès 2030-2035 », a précisé Sébastien Arbola. Et, peut-être, permettre à l'industrie de continuer d'utiliser du gaz, qui offre une forte flexibilité dans ses usages, tout en se passant des combustibles fossiles.

Marine Godelier

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Commentaires 15
à écrit le 17/11/2021 à 17:36
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"Hydrogène bas carbone :" pourquoi pas zéro carbone ? Le nucléaire en apporte un peu (en bilan total) du carbone ? L'électricité éolienne ou photovoltaïque aussi ? Zéro c'est bas mais bas, ça ne fait pas "pur" si on chipote (déformation professionnel...

à écrit le 17/11/2021 à 11:23
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Encore le Bla Bla d'un banquier d'affaires, ils sont où les ingénieurs et elle est où la recherche fondamentale publique ?

le 19/11/2021 à 16:17
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Justement Genvia est issue d'un partenariat avec un organisme public de recherche français le CEA.

à écrit le 17/11/2021 à 9:04
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Chaque président nous fait son plan avec des milliards qui pleuvent mais au bout un résultat inversement proportionnel aux discours voir François Jacques et Nicolas .

le 17/11/2021 à 10:01
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et toujours le pays le moins industrialisé de la zone euro. de plus une agriculture abandonnée

le 17/11/2021 à 17:29
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@voila 'de plus une agriculture abandonnée ' Mais ou passe le pognon ? Le budget alloué aux aides de la PAC pendant cette période de transition a été revalorisé à hauteur de 9,8 milliards d'euros de crédits européens par an pour les années 202...

à écrit le 17/11/2021 à 7:25
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Quel ratio entre l'énergie utilisée a faire de l'hydrogène et l'énergie récupérée par l'utilisation de cet hydrogène? Autant passer au tout électrique et garder le pétrole pour l'aviation (en la limitant aux trajets de plus de 1000 km ou s'il y a une...

le 17/11/2021 à 9:11
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le rendement final avec l'hydrogène est d'environs la moitié que le tout electrrique.

le 18/11/2021 à 7:00
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@Adieu BCE Un facteur de 2 je vous trouve bien optimiste, l'électrolyse ne me parait pas un procédé bien efficace même s'il y a surement des manière de le doper ,je verrais franchement plus sur l'ensemble de la production/utilisation

à écrit le 16/11/2021 à 21:28
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Tout cela ne rime à rien

le 17/11/2021 à 1:36
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C'est en terme politique de la com. micron ventile beaucoup.

à écrit le 16/11/2021 à 20:56
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Ca me gène d'être blessant sur le physique, c'est pas mon habitude, mais vous avez vu comme il a de ridicules petites oreilles?! Ca va passer ça?

le 16/11/2021 à 21:37
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Oui, mais cette petite teinture blond cendré intersectionnelle et transhumaniste est du plus bel effet.😁

le 17/11/2021 à 1:37
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Ce n'est pas des oreilles de lapin. Trop mechant pour etre un lapin.

le 17/11/2021 à 15:40
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@matin calme : les lapin s, ce sont les électeurs, car ce sont eux qui se font toujours prendre par les oreilles

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