Fessenheim, 1977-2020. Le premier réacteur de la centrale du Haut-Rhin a été arrêté le 23 février 2020, le second le 30 juin suivant, au terme d’une bataille – plus politique qu’économique – qui a duré huit ans. Et en vertu de la doctrine d’EDF, le démantèlement a débuté rapidement. La mission d’information de l’Assemblée nationale, qui a travaillé un an et demi sur le sujet, en tire un premier bilan dans un rapport publié mercredi 6 octobre. Elle fait des recommandations pour accompagner l’arrêt de douze autres réacteurs d’ici à 2035 – prévu par la Programmation pluriannuelle de l’énergie afin de ramener de 75 % à 50 % la part d’électricité d’origine nucléaire – et identifiés par EDF : Le Blayais, Bugey, Chinon, Cruas, Dampierre, Gravelines et Tricastin.
Les reconversions de sites nucléaires sont des opérations de grande ampleur excédant les capacités financières des collectivités, et le rapport prône une coordination étroite avec les opérateurs nucléaires et l’Etat. Il souligne « la nécessité absolue d’un calendrier plus précis pour donner de la visibilité », connaître les coûts et organiser une filière industrielle. De gros progrès restent à faire pour créer cette filière, dont le « technocentre » de Fessenheim, épicentre de la reconversion du territoire alsacien, serait un élément-clé.
Activité ni rentable ni attractive
Son modèle d’affaires « reste à construire », souligne le rapport. Comme il reste à industrialiser le démantèlement du parc actuel, qui s’échelonnera au-delà de 2100. La France dispose des compétences nécessaires, assurent ses auteurs. Mais cette activité n’est ni rentable, ni attractive, ni susceptible de fournir un relais de croissance pour le secteur nucléaire, préviennent-ils. Sur la base du démantèlement de Chooz A (Ardennes) et de neuf réacteurs américains proches des unités françaises de 900 mégawatts (MW), EDF donne une fourchette de 350 millions à 500 millions par réacteur. Il a provisionné 20 milliards.
Autre problème : à mesure que les centrales fermeront, les matériaux dits de « très faible activité » radiologique vont engorger des centres de stockage en voie de saturation. Car les normes françaises sont plus strictes que celles des autres pays européens : sont considérés comme déchets radioactifs tous les matériaux sortant d’une centrale, même si leur radioactivité est inférieure à la radioactivité naturelle, voire nulle. Pour EDF, qui veut faire du technocentre un lieu d’innovation, ce sont des ressources réutilisables, même si ce n’est pas pour fabriquer des produits grand public.
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