L’agrivoltaïsme consiste à faire cohabiter sur une même parcelle une installation photovoltaïque et une activité agricole, par exemple l’élevage de moutons. Mais jusqu’ici, très peu de recherches ont été menées pour déterminer scientifiquement l’impact des panneaux sur la croissance de l’herbe. C’est la raison pour laquelle, l’INRAE[1], Photosol[2] et JPee[3] se sont associés depuis l’été 2020 pour étudier la question.

Deux sites ont été mis à la disposition de l’INRAE pour mener une expérimentation rigoureuse de l’influence des modules sur les prairies. Le premier se situe à Braize dans l’Allier, à 300 mètres d’altitude, et le second dans le Cantal à Marmanhac, à 900 mètres d’altitude. Les conditions climatiques différentes permettent d’obtenir des résultats représentatifs d’environnements variés.
Chacun des deux sites est associé à un élevage de moutons et dispose gratuitement du pâturage. Cette coactivité agrivoltaïque permet d’entretenir les prairies à peu de frais, et comme on le verra ci-dessous, elle profite de la présence bénéfique des panneaux sur la pousse de l’herbe. Une situation win-win en quelque sorte.

À lire aussi L’agrivoltaïsme sort de l’ombre et stimule les rendements agricoles

Sous les panneaux, la croissance de l’herbe est jusqu’à 200 % supérieure 

Les scientifiques de l’institut ont placé des sondes de température et d’humidité dans l’air et sur le sol, des capteurs du rayonnement solaire, ainsi qu’une mini-station météo qui mesure les précipitations, la vitesse et la direction du vent. Des observations sont effectuées sous les panneaux, dans les allées, ainsi que dans des zones témoins, en dehors de l’influence des modules photovoltaïques. Les chercheurs ont analysé l’humidité du sol, la hauteur de pousse de l’herbe et la qualité du fourrage.

Les résultats des mesures effectuées pendant l’été 2020 ont démontré qu’en moyenne sur les deux sites, l’humidité au sol était 28 % plus importante sous les panneaux que dans les allées exposées au soleil. Quant à la température au sol, elle était de 4 à 6°C inférieure, évitant ainsi plus facilement la sécheresse. « Pendant l’été 2020, nous avons constaté que la croissance de l’herbe était de 125 % à 200 % supérieure sous les panneaux à celle qui pousse en plein soleil », explique Catherine Picon-Cochard, directrice de l’unité de recherche sur l’écosystème prairial à l’INRAE. « L’indice de végétation est aussi plus élevé, c’est-à-dire que l’herbe reste verte plus longtemps », ajoute-t-elle.

À lire aussi Les parcs photovoltaïques peuvent-ils faire bon ménage avec la biodiversité ?

Un atout pour les éleveurs

Des résultats que confirment Photosol et JPee : « Au cours de cette première année d’étude, nous avons observé un meilleur maintien de la production cumulée de biomasse, avec un étalement plus lisse de la ressource fourragère sur l’année », confirment-ils avec l’INRAE dans un communiqué. « Alors que le changement climatique modifie les calendriers fourragers, cette meilleure productivité estivale peut être un atout pour les éleveurs » précisent-ils.

Barbara Pompili et le Sénat favorables à la technique

Les résultats de cette nouvelle étude plaident en faveur d’un développement de l’agrivoltaïsme. Du côté du Sénat, en tout cas, on y croît : la chambre haute du parlement français vient d’adopter une résolution invitant le gouvernement à faciliter le déploiement de la technologie. « Cette pratique pourrait répondre aux enjeux agricoles et de développement durable de notre pays : souveraineté alimentaire, reconquête de la biodiversité, production d’énergie renouvelable », a déclaré Jean-François Longeot, un sénateur du Doubs.
Quant à Barbara Pompili, la ministre de la Transition écologique qui a été auditionnée par les sénateurs à cette occasion, elle s’est également montrée favorable : « Pour moi il s’agit vraiment d’une technologie vertueuse qui contribue à la fois au développement des énergies renouvelables et à l’adaptation de l’agriculture aux changements climatiques », a-t-elle expliqué.

À lire aussi Des chercheurs belges testent l’agrivoltaïsme dans les vergers À lire aussi Pyrénées-Orientales : début des vendanges pour le premier vin agrivoltaïque au monde

_________________________________________________

[1] INRAE : Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement

[2] Photosol est une entreprise qui développe, finance et exploite des installations photovoltaïques. La société détient en propre et exploite 450 MWc de solaire en France.

[3] JP Energie Environnement est un producteur indépendant français d’énergies renouvelables fondé en 2004. JPee développe, finance, construit et exploite des parcs éoliens et solaires sur l’ensemble du territoire français.