L’Assemblée nationale soutient le nucléaire, l’exécutif cherche des alliés en Europe

Les très larges majorités en faveur du texte sur le redéploiement de la filière nucléaire française — 239 voix au Sénat contre 16 et 402 voix contre 130 à l’Assemblée nationale — mettent le gouvernement en position très avantageuse pour l’adoption définitive de son texte. [Spech / shutterstock]

Alors que l’Assemblée nationale a voté mardi (21 mars) en faveur de la relance du nucléaire, la France cherche à renforcer ses liens avec ses alliées européens, et notamment les Pays-Bas, soutient une députée franco-néerlandaise opposée au nucléaire.

Après les sénateurs fin janvier, les députés ont voté mardi en première lecture en faveur du projet de loi d’accélération du redéploiement du nucléaire. Le texte doit encore être amendé en commission mixte paritaire, puis soumis à un second vote parlementaire. 

Mais d’ores et déjà, les très larges majorités en faveur du texte — 239 voix au Sénat contre 16 et 402 voix contre 130 à l’Assemblée nationale — mettent le gouvernement en position très avantageuse pour l’adoption définitive de son texte.

À terme, l’objectif est de construire six, puis huit réacteurs nucléaires EPR2, avec un premier béton coulé en 2027.

« Nous avançons sur le troisième pilier de notre transition énergétique », a déclaré la ministre de l’Énergie, Agnès Pannier-Runacher, à l’issue du vote.

Les deux autres piliers, aussi annoncés par le président de la République en février 2022 lors de son discours de Belfort, reposent sur le déploiement en cours d’une stratégie de sobriété énergétique, ainsi que sur la loi d’accélération du développement des énergies renouvelables adoptée le 7 février dernier.

Le Parlement entérine la loi d’accélération des énergies renouvelables

Le Parlement a définitivement entériné mardi (7 février) la loi sur l’accélération du développement des énergies renouvelables. La France fait ainsi un pas supplémentaire pour réduire l’écart qui sépare son bouquet renouvelable de celui de ses voisins européens et atteindre des objectifs européens ambitieux.

Le « revirement tant réclamé » dans la politique énergétique française, selon les mots du président du groupe Les républicains (LR — droite) à l’Assemblée, Olivier Marleix, intervient dans un temps fort européen. La France tente en effet de faire valoir les atouts de son mix électrique nucléarisé pour la transition énergétique de l’UE.

Le gouvernement français, appuyé par un certain nombre d’États membres, souhaite intégrer le nucléaire aux objectifs de développement des énergies renouvelables et d’hydrogène vert. De l’autre, l’Allemagne mène un groupe qui s’y oppose.

Pour élargir ses soutiens, la France est donc « en train de chercher d’autres partenaires en Europe », déclare pour EURACTIV France Julie Laernoes, chef de file des écologistes (EELV — NUPES) sur le texte voté mardi et opposante au nucléaire. 

Le président de la République pourrait ainsi chercher du côté des Pays-Bas, avance-t-elle.

« Les Pays-Bas étaient très tournés vers l’Allemagne et Emmanuel Macron cherche des alliés très libéraux. Les Pays-Bas sont très libéraux », explique-t-elle.

Le pays participe déjà à l’ « alliance du nucléaire » regroupant 11 États membres et lancée par la France fin février pour coopérer sur des projets communs.

Présidente du groupe d’amitié parlementaire franco-néerlandais, Mme Laernoes se rendra, à ce titre, avec le président de la République aux Pays-Bas les 11 et 12 avril prochain. Le déplacement sera l’occasion de discuter des subventions en faveur de l’industrie verte européenne avaient déclaré le président français et le Premier ministre néerlandais, Mark Rutte, lors d’une conférence de presse commune mi-février. 

Onze États membres de l’UE ont lancé une alliance du nucléaire en Europe

Onze États membres de l’UE se sont engagés à « coopérer plus étroitement » dans l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement nucléaire et à promouvoir des « projets industriels communs » pour les nouvelles capacités de production et les nouvelles technologies.

En cette matière, la Commission européenne présentait jeudi dernier (16 mars) sa proposition d’un « Net zero industry act » pour une industrie européenne décarbonée et autonome.

Parmi les technologies privilégiées à ces fins figure le nucléaire. Un « signal positif », ont déclaré ses défenseurs dans la foulée de la présentation, même si le nucléaire existant et les réacteurs nucléaires EPR2 ne sont pas pris en compte. 

L’eurodéputé Christophe Grudler, membre de Renew — groupe dans lequel siègent les représentants de la majorité présidentielle —, a toutefois signalé à EURACTIV France que l’intégration de ces technologies existantes ferait partie des négociations au Parlement européen à venir sur le texte de la Commission. 

Mais pour Mme Laernoes, le gouvernement et les élus de la majorité agitent « un mantra idéologique », car pour l’heure, « nous n’avons toujours pas le design des EPR2, ni validé le prolongement des centrales existantes ». 

La facilitation du prolongement des centrales existantes jusqu’à 60 ans est pourtant actée par le texte voté mardi, mais le président de l’Autorité de sûreté nucléaire a en effet signalé qu’une position devrait être prise d’ici à fin 2026 et pas avant fin 2024. 

En somme, « le texte d’affichage politique est très loin de la réalité industrielle et financière », poursuit Mme Laernoes. 

Industrie verte de l'UE : la Commission envoie un « signal positif » sur le nucléaire, selon ses défenseurs

Après de nombreux rebondissements, le Commission intègre finalement le nucléaire dans sa proposition pour une industrie européenne décarbonée et autonome. Les défenseurs de l’atome saluent un « signal politique positif », mais restent très vigilants sur la substance réelle de cette reconnaissance.

Inscrivez-vous à notre newsletter

S'inscrire