Algérie : Macron entrouvre le «secret-défense»

Dans le cadre du travail de mémoire sur la guerre d’Algérie, le chef de l’Etat a décidé de faciliter pour les chercheurs la déclassification de documents secrets.

 L’Elysée indique que cette déclassification couvrira toute la période de la guerre d’Algérie, de 1954 à 1970.
L’Elysée indique que cette déclassification couvrira toute la période de la guerre d’Algérie, de 1954 à 1970. AFP/Yoan VALAT

    Dans le « travail de mémoire » sur la guerre d'Algérie, le geste est hautement symbolique. Il s'inscrit dans la démarche entamée avec la récente remise, le 20 janvier, du rapport de l'historien Benjamin Stora. Dès demain mercredi, les services d'archives seront autorisés à communiquer aux chercheurs des documents classifiés « Secret-défense nationale ». Cette décision d'Emmanuel Macron, très engagé sur ce dossier, intervient peu après la reconnaissance de la responsabilité de la France dans l'assassinat en 1957 de l'avocat indépendantiste algérien Ali Boumendjel.

    Concrètement, aujourd'hui, pour travailler sur des documents « secrets » du ministère des Affaires étrangères, des Archives nationales ou du service historique du ministère des Armées, les universitaires doivent obtenir un tampon de déclassification. Tampon qui doit être apposé, feuille par feuille, par les archivistes chargés d'estimer si ces informations peuvent être rendues publiques. Procédure non seulement très longue, mais aussi arbitraire. Désormais, indique l'Elysée, cette déclassification se fera par cartons, sera donc plus rapide, et couvrira toute la période de la guerre d'Algérie : de 1954 à 1970, date du départ du dernier soldat français en Algérie après l'indépendance. Des dossiers aussi sensibles que ceux touchant aux disparitions – même si l'Elysée précise qu'il n'y a pas un gros dossier « spécial disparus », mais des informations disséminées au fil des documents – seront ainsi accessibles, au cas par cas, aux chercheurs.

    Des anciennes informations toujours ultra-sensibles

    Que recèlent exactement les cartons enfouis dans les caves de l'Etat ? Tout, absolument tout ce que « l'Etat est susceptible de produire dans un document interne », indique-t-on à l'Elysée. Cela peut être le verbatim d'une réunion importante, le brouillon d'une décision officielle, des statistiques demandées par le gouvernement sur tous les sujets possibles, des plans… Tout ne sera pas néanmoins dévoilé avec cette réforme. Certaines informations, aussi anciennes soient-elles, restent ultra-sensibles. Exemple : « il ne serait pas pertinent de communiquer les plans de l'ambassade de France à Bagdad, pour qu'ils soient ensuite publiés ou mis en ligne ! ». Il s'agira toujours, insiste l'Elysée, de trouver un équilibre entre les impératifs de la protection de la nation – donc le secret-défense – et l'impératif démocratique pour l'Etat de rendre compte aux citoyens de son action.

    Sur l'Algérie, il reste un gros bémol : les informations et secrets touchant au nucléaire restent non communicables, faisant l'objet d'une législation à part. Or la France a mené plusieurs essais nucléaires dans les années 1960 dans le Sahara algérien. Le « travail mémoriel » avance, mais il reste encore beaucoup de thèmes brûlants.