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La vie ravagée des "liquidateurs" de Tchernobyl

A l'occasion du 25e anniversaire de la catastrophe, mardi 26 avril, les survivants réclament plus de considération.

Par  (Directeur du "Monde") et Jérôme Fenoglio

Publié le 25 avril 2011 à 16h01, modifié le 15 octobre 2013 à 17h10

Temps de Lecture 4 min.

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Quand il évoque son existence, ravagée par l'explosion du réacteur 4 de Tchernobyl, le 26 avril 1986, Alexandre Sokolov s'excuse de devoir parfois s'interrompre. "Ce sont les conséquences de l'irradiation, explique-t-il. J'ai des trous de mémoire et je perds le fil de ma pensée." Mais lorsqu'il s'agit de raconter son ami Anatoli Skoupen, comme ce jeudi 21 avril, aux élèves de l'école de Zamichevo, tout près de la ville contaminée de Novozybkov (Russie), l'ancien liquidateur parle d'une traite, sans hésiter.

Tous deux faisaient partie de la trentaine de réservistes originaires de cette région russe, mobilisés début juillet 1986 pour tenter de limiter les dégâts du désastre nucléaire, à 200 kilomètres de là. Pour leur division, les premiers temps ont été consacrés à construire des digues. Il fallait empêcher les eaux radioactives de s'écouler dans le Dniepr, le fleuve majeur de la région. Puis, un jour, fin septembre, le général Tarakanov a demandé que les membres du Parti communiste fassent un pas en avant de la troupe.

"Il nous a dit qu'il y avait une mission spéciale pour nous, raconte Alexandre Sokolov. On nous a montré des images sur un écran : pour ne pas être grillés par les radiations, nous avions moins d'une minute pour faire tomber des blocs de graphite radioactif du toit du réacteur 3 dans le trou creusé par l'explosion." Pour ce travail, ils étaient équipés de lourds tabliers de protection, qui pesaient leurs 40 kg de plomb, et de pelles. Sur le toit, Alexandre se souvient avoir vu Anatoli ramasser à pleines mains un énorme morceau de graphite, et le porter contre lui pour le jeter dans le vide. "C'était un colosse de près de 2 mètres, en parfaite santé. Il n'avait peur de rien. Mais ce soir-là, il n'est pas arrivé à récurer ses mains correctement. Il avait comme des fragments de graphite incrustés dans les paumes."

La mission spéciale des deux hommes était achevée. Ils sont rentrés reprendre leur travail à Novozybkov, gravement polluée dès le début mai par des pluies radioactives. Leur certificat médical indiquait que tous les liquidateurs de la division avaient absorbé la même dose d'irradiation : 20 röntgens. La suite, c'est la soeur d'Anatoli Skoupen, montée à son tour à la tribune, qui la raconte aux écoliers de Zamichevo. "Très vite, il s'est plaint de ne pas se sentir bien, mais les analyses ne montraient rien, raconte cette médecin vêtue de noir. Comme j'exerçais très loin de Novozybkov, je ne le voyais pas souvent. Un jour, il m'a dit qu'il souffrait de violents maux de ventre. Le temps du voyage, je suis arrivée pour son enterrement."

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