Donald Trump a annoncé, mardi 8 mai, le retrait des Etats-Unis de l’accord de 2015 sur le programme nucléaire iranien, qu’il a qualifié de « désastreux ». Il a également déclaré rétablir des sanctions contre le régime iranien. Cette annonce risque d’ouvrir une période de vives tensions avec ses alliés européens et d’incertitudes quant aux ambitions atomiques de Téhéran.
Le retrait des Etats-Unis était une des promesses de campagne de Donald Trump, qui n’a cessé de dénoncer les termes de cet accord conclu en 2015 par son prédécesseur démocrate Barack Obama, après vingt et un mois de négociations. En vertu de cet accord, conclu entre l’Iran, les Etats-Unis, la France, la Russie, la Grande-Bretagne, la Chine et l’Allemagne, Téhéran a accepté de réduire ses activités nucléaires en échange d’une levée progressive de la majeure partie des sanctions internationales qui le visaient.
Large palette de sanctions
Conséquence de la dénonciation de l’accord par Washington, les Etats-Unis vont rétablir une large palette de sanctions concernant l’Iran à l’issue de périodes transitoires de 90 à 180 jours, qui viseront notamment le secteur pétrolier iranien ainsi que les transactions en dollars avec la banque centrale du pays, a annoncé mardi le département du Trésor américain.
Dans un communiqué et un document publiés sur son site Internet, le Trésor précise que le rétablissement des sanctions concerne également les exportations aéronautiques vers l’Iran, le commerce de métaux avec ce pays, ainsi que toute tentative de Téhéran d’obtenir des dollars US.
« Il s’agissait d’un abominable accord unilatéral qui n’aurait jamais dû être conclu, a estimé Donald Trump. Il n’a pas apaisé la situation. Et il n’a pas apporté la paix. Et il ne l’apportera jamais. Il est évident, à mes yeux, qu’avec la structure fragilisée et pourrie de l’accord actuel, on ne peut empêcher l’Iran de se doter d’une bombe nucléaire. »
« Au cœur de cet accord, il y avait une fiction, a insisté Donald Trump, lors de son intervention : un régime meurtrier, qui voudrait la paix. Mais c’était un mensonge et nous en avons la preuve », a estimé le président américain, en déclarant qu’il était prêt à conclure un nouvel accord avec l’Iran quand ce pays y serait disposé.
Le locataire de la Maison Blanche a mis en garde : « Tout pays qui aidera l’Iran dans sa quête d’armes nucléaires pourrait aussi être fortement sanctionné par les Etats-Unis. »
Téhéran dénonce « une guerre psychologique »
Cette annonce relève d’« une guerre psychologique », a réagi le président iranien, Hassan Rohani, précisant que Téhéran n’entendait pas se retirer de l’accord. Il a assuré vouloir discuter avec les Européens, les Russes et les Chinois. « J’ai donné pour consigne au ministère des affaires étrangères de négocier avec les pays européens, la Chine et la Russie dans les semaines à venir. Si, au bout de cette courte période, nous concluons que nous pouvons pleinement bénéficier de l’accord avec la coopération de tous les pays, l’accord restera en vigueur », a-t-il déclaré.
Le président iranien a également averti que son pays pourrait mettre un terme aux restrictions qu’il a consenties sur ses activités d’enrichissement d’uranium :
« J’ai ordonné à l’Organisation iranienne de l’énergie atomique de prendre les mesures nécessaires (…) pour qu’en cas de nécessité nous reprenions l’enrichissement industriel sans limite. (…) Nous attendrons quelques semaines avant d’appliquer cette décision », en fonction du résultat des discussions entre Téhéran et les autres partenaires de l’accord, a-t-il ajouté.
Le guide suprême de la révolution iranienne, Ali Khamenei, s’est montré plus virulent envers Donald Trump et sa décision. « Il y avait peut-être une bonne dizaine de mensonges dans son discours. Il a menacé le régime et le peuple, en leur disant de faire ceci ou cela. Monsieur Trump, je vous le dis au nom du peuple iranien : vous avez commis une erreur », a-t-il écrit sur son site internet.
De son côté, le premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, a dit « soutenir totalement » la décision « courageuse » de Donald Trump de désengager son pays de l’accord nucléaire avec l’Iran.
Cette décision a également été saluée par l’Arabie saoudite. Premier exportateur mondial de pétrole, le royaume a déclaré qu’il prendrait toutes les mesures nécessaires et « travaillera avec les principaux producteurs de pétrole à l’intérieur et à l’extérieur de l’OPEP, ainsi qu’avec les principaux consommateurs », pour empêcher des pénuries d’approvisionnement en pétrole.
Paris, Berlin et Londres veulent continuer à appliquer l’accord
La France, l’Allemagne et le Royaume-Uni ont exprimé, mardi, leur « préoccupation » et se sont dits « déterminés » à continuer à appliquer l’accord nucléaire iranien, tout en travaillant à en négocier un nouveau, plus large, ont annoncé les trois pays, mardi.
« Nous resterons parties au JCPOA [acronyme de l’accord] », déclarent dans ce communiqué commun Emmanuel Macron, Theresa May et Angela Merkel. « Nos gouvernements restent déterminés à assurer la mise en œuvre de l’accord et travailleront à cet effet avec les autres parties qui resteront engagées », disent-ils, en « maintenant les bénéfices économiques » au profit de la population iranienne.
Le président français, Emmanuel Macron, qui s’est entretenu en début de soirée avec ses homologues allemande et britannique, avait plus tôt affirmé que les trois pays européens voulaient « œuvrer collectivement à un cadre plus large » :
L’ancien président américain, Barack Obama, a, quant à lui, qualifié de « grave erreur » la décision de Donald Trump, jugeant que l’accord sur le nucléaire iranien « fonctionne » et est dans l’intérêt de Washington.La Russie et la Chine, également signataires de l’accord, ont eux aussi exprimé leur déception, la Russie dénonçant « une violation grossière des normes du droit international ».
« Profondément préoccupé par l’annonce du retrait des Etats-Unis », le secrétaire général des Nations unies (ONU), Antonio Guterres, a appelé, mardi, les autres signataires de l’accord sur le nucléaire iranien de 2015 « à respecter pleinement leurs engagements ». La Syrie a condamné la décision de Trump, qu’elle qualifie d’« agression », tandis que la Russie s’est dite « profondément déçue ».
L’accord sur le nucléaire iranien a été conclu en juillet 2015 par l’administration américaine précédente avec l’Iran, mais aussi les trois pays européens historiquement à l’origine de la négociation (Allemagne, France, Royaume-Uni) et les deux autres membres permanents du Conseil de sécurité des Nations unies (Chine et Russie).
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